À l’heure du numérique, comment sauver nos médias ?

déc 04, 2019

La plus grave crise depuis l'invention de l'imprimerie À l’heure du numérique, comment sauver nos médias? Une centaine de chercheurs et participants se sont penchés sur la question. Du 4 au 6 octobre à l’Université Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse, le grand colloque Les médias francophones sous toutes leurs coutures est revenu sur le rôle des médias, leurs défis et occasions en cette période de crise inédite. Bannir la gratuité «La rupture qu’on vit aujourd’hui est probablement la plus grave crise à laquelle les médias sont confrontés depuis la création même de l’imprimerie», estime Sylvain Lafrance, présentateur de la conférence d’honneur. Le professeur à HEC Montréal et président du conseil d’administration de TV5 Numérique a décrypté les origines de la crise des médias avant d’en venir à plusieurs recommandations. En premier lieu: bannir la gratuité. «L’information doit avoir un prix car elle a un coût», raisonne-t-il. Selon lui, le citoyen doit mettre la main à la poche s’il veut sauver la démocratie. «La gratuité entraîne une déresponsabilisation du citoyen face aux grands enjeux démocratiques et culturels. Les citoyens doivent accepter de s’impliquer.» Engagement du gouvernement Sylvain Lafrance. Photo: Alexandre Pirottin En pleine révolution numérique, et pour affronter les imposants GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), les médias devraient aussi pouvoir compter sur le gouvernement, croit Sylvain Lafrance. Le professeur appelle à réinvestir de l’argent publicitaire dans les journaux et radios traditionnels, mais aussi à réformer les lois sur les droits d’auteur, la radiodiffusion et les langues officielles. «Très souvent, les ministres disent qu’il faut accepter que le monde devienne numérique, accepter de changer, mais les lois, règlementations et financements publics ne changent pas.» Rétablir la crédibilité des médias Au-delà de la question financière, l’intervenant relève aussi la question de la découvrabilité des produits de langue française. À ses yeux, les gros diffuseurs comme Radio-Canada, TFO et l’ONF ont un rôle à jouer dans la visibilité des contenus, trop souvent noyés dans l’abondance du web. En outre, Sylvain Lafrance se dit favorable à la création d’un tribunal de la presse indépendant pour s’assurer du respect des normes journalistiques et rétablir la crédibilité des médias auprès du public. Moins de revenus, plus de partenariats? Plusieurs conférences, tables rondes et forums ont ponctué les trois jours du colloque. Photo: Alexandre Pirottin En marge du colloque, le consultant Martin Théberge a animé un forum afin de développer des pistes de solutions pour un avenir meilleur de l’industrie. Responsables communautaires, représentants du gouvernement, journalistes, chercheurs et citoyens lambdas sont tombés d’accord pour dire que plus de collaboration s’avérait cruciale en ces temps incertains. «Il faut penser autrement, analyse le conseiller. Plutôt que d’avoir plus de revenus, on peut réduire les dépenses et gagner en efficacité. C’est toute la question des partenariats.» Un rapprochement avec les universités pourrait par exemple ouvrir la voie à de nouvelles pistes. Également, le partage de ressources entre médias, autant humaines que matérielles, offrirait une solution.