Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) à La Presse : « Nous sommes confiants que la Tunisie réussira cet événement »

déc 22, 2020

Ce Sommet devra rompre avec certains aspects protocolaires et s’ouvrir davantage sur les populations en vue d’apporter de nouvelles visions, mais aussi de nouvelles opportunités. Evoquant les préparatifs pour cet événement majeur, la secrétaire générale de l’OIF s’est montrée satisfaite des infrastructures dont dispose l’île de Djerba, affirmant que la Tunisie montrera qu’elle est capable d’abriter ce genre d’événements majeurs.

L’île de Djerba accueillera, les 20 et 21 novembre 2021, le prochain Sommet de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). C’est sur initiative du Président de la République, Kaïs Saïed, et en coordination avec la secrétaire-générale de l’OIF que les assises du Sommet se dérouleront, non pas à Tunis, mais dans cette île du sud tunisien, un choix loin d’être arbitraire.

C’est dans ce contexte que la secrétaire générale de l’OIF, la Rwandaise Louise Mushikiwabo, est en visite en Tunisie, pour suivre notamment les préparatifs à ce rendez-vous majeur qui mêle relations internationales et enjeux politiques, culturels et économiques. En effet, de passage à Tunis où elle a rencontré, vendredi 18 décembre, le Chef de l’Etat Kais Saied, Louise Mushikiwabo a accordé un entretien à La Presse à travers lequel elle est notamment revenue sur les différents enjeux de ce Sommet qui coïncide avec la célébration du cinquantenaire de l’OIF, un événement majeur pour l’organisation comme pour la Tunisie.

Au fait, pour Louise Mushikiwabo, ce Sommet devra rompre avec certains aspects protocolaires et devra s’ouvrir davantage sur les populations en vue d’apporter de nouvelles visions, mais aussi opportunités. «Je n’aime pas le mot réforme, mais je pense qu’il est temps d’apporter une nouvelle vision à la manière avec laquelle sont organisés les sommets de la francophonie. C’est d’ailleurs pour cela que le prochain sommet de Djerba sera axé plutôt sur les tables rondes, sur les discussions et les débats entre chefs d’Etat au détriment des longs discours et allocutions protocolaires», explique-t-elle.

Evoquant les préparatifs pour cet événement majeur, la secrétaire-générale s’est montrée plutôt satisfaite des infrastructures mises en place à l’île de Djerba, affirmant que la Tunisie montrera qu’elle est capable d’abriter ce genre d’événements majeurs. «Nous ne sommes pas inquiets compte tenu des infrastructures en Tunisie, les préparatifs vont bon train, et nous sommes confiants que la Tunisie réussira ce rendez-vous», a-t-elle martelé, rappelant que des travaux sont en cours pour aménager certains espaces et qu’il était plus facile de sécuriser l’île plutôt que la capitale Tunis. Et de préciser que le choix de Djerba pour abriter cet événement n’est pas aléatoire, mais vise à transmettre un message de solidarité et de cohabitation, comme le symbolisent les valeurs de cette île.

Le premier responsable de l’OIF affirme aussi que ce sommet est particulièrement très attendu et constitue un enjeu pour la francophonie comme pour l’organisation et la Tunisie. Et de rappeler que de nombreux chefs d’Etat sont attendus à Djerba en dépit des conditions sanitaires exceptionnelles.

Une opportunité pour la Tunisie

Interrogée sur l’impact économique, social et même diplomatique de cet événement sur la Tunisie, Louise Mushikiwabo pense que notre pays bénéficiera amplement de ce rendez-vous et accédera à de nouvelles opportunités économiques et notamment touristiques.

Car, pour elle, de nombreux chefs d’Etat seront en Tunisie, d’où un intérêt particulier qui pourrait être porté sur l’économie tunisienne qui connaît une mauvaise période. Sur le plan social, la responsable pense également que la Tunisie devra parfaitement bénéficier de ce sommet puisqu’il y aura d’énormes espaces dédiés à l’échange et aux discussions à vocation sociale. «C’est pour ce fait que j’ai insisté personnellement à ce que ce sommet soit ouvert aux populations et que les chefs d’Etat interviennent et s’adressent directement aux citoyens par le biais des médias», insiste-t-elle.

Faire le bilan

«Après cinquante ans, il est temps de faire le bilan de l’organisation, il est temps d’apporter une nouvelle vision et de se pencher sur certaines questions précises», explique dans ce sens Louise Mushikiwabo pour dire que ce sommet requiert un intérêt particulier pour les pays membres comme pour l’Organisation. Rappelant que l’ancien président de la République, Habib Bourguiba, était parmi les principaux fondateurs de l’OIF, elle estime nécessaire de moderniser les modes de travail de l’organisation en se tournant davantage vers le numérique, d’où le thème du 18e sommet de la francophone qui portera sur le numérique comme vecteur de changement.

Evoquant, entre autres, les actuels projets de l’Organisation, la secrétaire générale rappelle que la francophonie se penche actuellement sur l’autonomisation des femmes dans les contextes francophones. Car, pour elle, il est important de donner les clés du succès à la femme en tant qu’acteur indépendant, notamment dans certains pays africains, y compris la Tunisie et au Liban. «Nous avons d’ailleurs mis en place un fonds d’appui aux femmes ayant perdu leurs emplois à cause de la crise sanitaire, et nous avons eu des résultats très encourageants», a-t-elle précisé.

La francophonie en recul !

La secrétaire générale de l’OIF a reconnu, dans ce contexte, que la francophonie est en recul par rapport à d’autres langues et qu’un grand travail reste à réaliser pour apporter certains changements à cette situation. Et d’expliquer ce constat par la montée en puissance de certains pouvoirs émergents et par des considérations géopolitiques, se montrant, en revanche, confiante compte tenu du grand potentiel et de la puissance de la francophonie. «La francophonie doit s’adapter au monde d’aujourd’hui, son pouvoir est énorme, mais nous devons certainement réajuster notre approche, apporter des changements et concevoir de nouvelles visions pour le monde de demain», a-t-elle conclu.

Mohamed Khalil JELASSI

La Presse