L'offensive des médias français pour survivre aux « Gafa »

déc 11, 2017

Le petit village gaulois trouvera-t-il une riposte face à l'empereur américain ? Cet été, les médias français ont annoncé des alliances pour tenter de résister à la toute-puissance des Gafa (Google, Amazon, Facebook Apple) dans la publicité numérique. Fait inédit, les deux grands rivaux de la presse quotidienne de l'Hexagone, Le Monde et Le Figaro, se sont unis pour lancer en ce mois de septembre une offre commune : Skyline. De leur côté, un ensemble d'autres médias, d'éditeurs et autres sociétés (Le Parisien-Les Échos, Lagardère, M6, Condé Nast, SFR, Fnac Darty…) ont dévoilé début juillet une alliance baptisée Gravity. Il s'agit d'une plateforme numérique commune et automatisée d'achat d'espaces publicitaires proposée aux annonceurs. Les membres de l'alliance y partagent l'intégralité des données personnelles des internautes dont ils disposent. « L'union fait la data », sentencie Denis Olivennes, PDG du groupe Lagardère Active, à l'origine avec le groupe Le Parisien-Les Échos de l'alliance Gravity.
Il y a urgence. Les Gafa captent plus de 90 % du marché de la publicité en ligne en France, plus des deux tiers pour les seuls Google et Facebook. « 80 à 115 % de la progression du chiffre d'affaires digital est aujourd'hui captée par les Gafa », explique Marc Feuillée, directeur général du groupe Figaro. De quoi déstabiliser le modèle économique des médias français. En s'alliant, ils entendent tenir tête aux géants américains. La centaine de marques réunies dans Gravity revendiquent une pénétration du marché publicitaire de 44 %, contre respectivement 60 % et 70 % pour Google et Facebook. Elles souhaitent se focaliser sur le segment de la publicité programmatique, qui recouvre l'ensemble des transactions publicitaires opérées de manière automatisée et à l'unité.
35,5 millions de visiteurs uniques
De leur côté, Le Monde et Le Figaro se targuent d'une audience groupée de 35,5 millions de visiteurs uniques sur les trois écrans (ordinateur, mobile, tablette), selon les chiffres Médiamétrie NetRatings de mai 2017, soit près de 80 % des internautes français. Ce chiffre les place derrière Google (44,3 millions), Facebook (40,1 millions) et Microsoft (36,8 millions). Désormais, les annonceurs et les agences publicitaires pourront lancer des campagnes communes aux sites des deux groupes (Lefigaro.fr, L’internaute, Le Journal des femmes, Lemonde.fr, Telerama.fr, L'Obs…) avec des formats identiques et des tarifs uniformisés. Il ne s'agit pas d'une fusion des régies publicitaires des groupes. Le duo va vendre ses espaces (vidéo et bannières) en arrêtant la commercialisation par des sous-régies intermédiaires. « Sur un euro investi par l'annonceur, nous ne récupérons que 30 à 40 centimes », explique Marc Feuillée, directeur général du groupe Figaro. « Nous perdons 80 % de la valeur via ces intermédiaires », affirme de son côté Louis Dreyfus, le président du directoire du groupe Le Monde.
Reste à savoir si ces deux alliances suffiront pour défier Google et Facebook. L'année dernière, les deux sociétés américaines ont raflé 92 % du segment le plus dynamique, la publicité numérique mobile en France, selon l'Observatoire de l'e-publicité.

Source : Le Point