Du chef de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon au ministère de la culture, l’idée de créer un conseil de déontologie de la presse fait son chemin dans le monde politique français. Ni tribunal ni ordre, cette instance d’autorégulation, qui existe dans une majorité de pays européens, promeut le droit des citoyens à une information de qualité, avec plus ou moins de pertinence selon sa composition et ses moyens.
Par Anthony Bellanger*
«BYE bye Belgium ! » Le 13 décembre 2006, à 20 heures, la Une annonce l’éclatement de la Belgique. Dans son fauteuil, le présentateur-vedette de la Radio-Télévision belge de la Communauté française (RTBF), Philippe Dutilleul, affirme, le regard grave, que la Flandre a déclaré unilatéralement son indépendance. Suivent des directs décrivant la désintégration du royaume fondé en 1830, avec des scènes de liesse à Anvers et des images de transports publics s’arrêtant désormais à une frontière gardée par des militaires. En duplex du palais royal, à Bruxelles, un journaliste raconte la fuite d’Albert II vers l’ancienne colonie de la République démocratique du Congo.
Le standard téléphonique de la RTBF est au bord de la rupture, et il faut attendre plus d’une demi-heure pour qu’un bandeau apparaisse au bas de l’écran : « Ceci est une fiction. » Dans les jours qui suivent, le pays est coupé en deux — réellement, cette fois. D’un côté, les partisans de l’humour ; de l’autre, ceux pour qui il n’est pas acceptable de tromper le public. Huit jours après le canular, la secrétaire nationale et le président de l’Association des journalistes professionnels (AJP) rappellent l’importance de la déontologie :« C’est peut-être même la seule balise visible dans le “brouillard” de l’info, dans la purée de pois qui l’amalgame au divertissement ou au publirédactionnel, dans l’illusion du virtuel, dans la perte de repères due aux mutations rapides du secteur médiatique et du journalisme en particulier. » Au nom de l’organisation représentative des journalistes belges, ils attirent l’attention sur une solution : « Si un conseil de déontologie externe, commun à l’ensemble du secteur, avait existé, il aurait été saisi des centaines de fois. Or ce conseil existe bel et bien en Communauté française… sur le papier ! »
Source : Le Monde diplomatique
{*Anthony Bellanger est le secrétaire général de la FIJ}