Nobel de la paix: Maria Ressa exhorte les journalistes à défendre leurs droits

déc 09, 2021

AGENCE FRANCE-PRESSE

La journaliste philippine Maria Ressa, colauréate du prix Nobel de la paix, a exhorté mercredi ses homologues à défendre leurs droits, pour ne pas les perdre, face aux «dirigeants au style autoritaire» et aux «dictateurs en herbe».

«C’est devenu incroyablement plus difficile et beaucoup plus dangereux pour chacun d’entre nous», a lancé Mme Ressa aux journalistes qui l’attendaient à sa descente d’avion à Oslo, où elle recevra vendredi le Nobel conjointement avec le Russe Dmitri Mouratov.

Fustigeant «les dirigeants au style autoritaire» et les «dictateurs en herbe» qui «veulent que nous renoncions de nous-mêmes à nos droits», la cofondatrice du site d’information Rappler, très critique du président philippin Rodrigo Duterte, a appelé la profession à défendre ses droits.

«Maintenant plus que jamais, nous devons protéger nos droits, sinon on les perdra», a-t-elle dit.

«Quand les faits sont menacés, quand il n’a y a plus de faits honnêtes, on ne peut pas avoir d’élections honnêtes. Ça commence avec nous: nous devons continuer à aller débusquer les faits et à servir la population», a ajouté l’ancienne correspondante de la chaîne américaine CNN.

La venue à Oslo de Mme Ressa, 58 ans, a longtemps été un point d’interrogation: bénéficiant actuellement d’une liberté conditionnelle en attendant un jugement en appel après sa condamnation l’an dernier pour diffamation, elle a été contrainte à demander à quatre tribunaux la permission d’aller chercher son prix en personne.

Très émue à son arrivée dans des températures glaciales, la journaliste philippine, protégée par un masque facial noir où il était écrit en anglais «Le journalisme n’est pas un crime», a dû lutter contre les larmes. «Il fait si froid, mais il fait si chaud», a-t-elle dit.

Mme Ressa a notamment braqué les projecteurs sur les violences accompagnant la campagne antidrogue initiée par le président Duterte, qui, selon les organisations de défense des droits humains, a fait des dizaines de milliers de morts.

Elle est l’objet de sept poursuites judiciaires au total, dont l’affaire de diffamation dans laquelle elle encourt jusqu’à six ans de prison.

M. Muratov, rédacteur en chef du journal critique Novaïa Gazeta, et elle ont été couronnés du Nobel en octobre pour leur combat pour la «sauvegarde de la liberté d’expression».