"La langue française, un enjeu de géopolitique", conférence débat de l'UPF en partenariat avec le Cercle de l'Union interalliée
En partenariat avec le Cercle de l'Union interalliée, l'UPF invitait au débat : André Belon, ancien président de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Christophe Gigaudaut, Délégué francophonie du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et Marie-Christine Saragosse, Présidente de France Médias Mondes sur la thématique : "La Langue française, un enjeu de géopolitique". Le débat était animé par Anne-Cécile Robert, présidente internationale de l'UPF.
"Un sujet qui parfois rebute mais qui est extrêmement important", le propos introductif de la présidente internationale de l'UPF, Anne-Cécile Robert se confirmait dans les interventions, toutes en nuances, d'un débat intensément riche qui a su révéler l'enjeu linguistique dans les rapports de la géopolitique mondiale. Le constat est posé d'entrée de jeu : si en France la bataille de la langue française est banalisée voir sous-estimée, dans d'autres contrées la bataille prend tout son sens pour préserver, "sauver" une langue française qui serait "en danger". "Outil d'influence", sans aucun doute prévenait Anne-Cécile Robert qui rappelait le Plan Marshal conditionnant l'aide à l'Europe après la seconde guerre mondiale, notamment par l'achat de films américains. Le débat opposant la promotion de la langue française face à une "hégémonie" de l'anglais parait aujourd'hui nuancé devant la percée chinoise, russe et turque dans les marchés mondiaux, notamment sur le continent africain. André Bellon raconte comment la langue française a été introduite dans la Constitution française en 1992 lors de la révision constitutionnelle imposée par l’adoption du traité de Maastricht.
S'il est souligné une certaine frilosité ou même parfois un flegme chez les français à mettre en avant la langue française - qui apparaît comme une évidence pour eux-, s'il est également rappelé une certaine forme de fierté qui pourrait être perçue comme une forme d'arrogance à manifester son attachement à la langue et à la culture françaises; il est également à noter un pouvoir d'influence très particulier de la langue française qui est du ressort de "de l'intime". La langue française parlerait au cœur, elle trônerait sur l'affect pendant que d'autres langues domineraient la sphère des marchés. On parlera de "pouvoir doux" du français, on évoquera une "diplomatie d'influence" où langue française se place, de fait, comme le "ciment" qui facilite la communication dans un espace francophone pluriel. La langue française contribuant à mieux révéler la richesse des cultures -dans leur diversité et leur spécificité -au sein de l'espace francophone commun.
Marie-Christine Saragosse, présidente du groupe France Médias Monde, citant Léopold Sedar Senghor - l'un des chantres de la francophonie-, soulignait le potentiel prometteur de l'espace francophone, notamment pour l'épanouissement de la langue française. "Les expressions francophones africaines régénèrent la langue française de manière poétique", déclare-t-elle. De son côté, s’appuyant sur son expérience en Asie et en Roumanie, Christophe Gigaudaut rappelle la nécessité de donner le goût de la langue française en créant des espaces de dialogue et de partage en français. Les mots clés sont, selon lui: diversité culturelle et multilinguisme. La promotion de la langue française s’inscrit dans un projet culturel multilingue dans lequel chacun doit pouvoir s’exprimer dans sa langue. Un souci partagé par André Bellon qui appelle à retrouver la joie de parler de français.
S'il est conclu à la nécessité de défendre le plurilinguisme comme valeur essentielle dans un espace francophone humaniste et fraternelle, il est déploré un arrière-goût de rejet du français dans certaines sphères -particulièrement en Afrique - où l'on n'hésite pas à faire l'amalgame entre la langue française est le colonialisme. La langue française devient dans la bouche de certains activistes, qui n'hésitent plus à contrer des initiatives d'enseignement du français, l'outil d'un "impérialisme". Le témoignage d'un participant du Mali est à ce propos très révélateur. Il souligne que des générations entières sont aujourd'hui privées d'école à cause de certains groupes engagés dans une bataille déclarée contre l'enseignement du français. En conclusion, Denis de Kergorlay, président du Cercle de l’Union interallié remercie l’UPF d’avoir pris l’initiative de lui proposer ce débat stimulant. L’assistance, nombreuse, comptait nombre de diplomates et de journalistes qui ont pu prolonger la discussion autour d’un cocktail.